Avec ESSEC Knowledge Editor-in-chief
Les marchés concurrentiels amènent les entreprises à proposer des prix compétitifs pour leurs produits, mais cela peut se passer différemment sur certains marchés, comme les marchés de l'assurance touchés par le phénomène de sélection adverse. Dans son dernier article publié dans le Journal of Mathematical Economics, Anastasios Dosis, professeur d'économie à l'ESSEC Business School, examine l'impact de la concurrence et de la sélection des risques sur les marchés, en particulier les marchés de l'assurance, et évalue différentes mesures visant à réduire les risques.
Certaines mesures sont employées pour limiter les risques, comme le risk adjustment ou les garanties minimales. Cependant, ces mesures ont souvent comme conséquence que les personnes jeunes et en bonne santé (considérées comme présentant un faible risque) ne sont pas assurées. Par conséquent, les législateurs mettent en œuvre des politiques visant à étendre l'assurance à ces populations. Cette situation a entraîné une hausse des primes d'assurance maladie aux États-Unis et ailleurs, d'où la question suivante : existe-t-il des politiques alternatives qui corrigent la sélection des risques sans nuire à la concurrence ?
Pour répondre à cette question, Dosis a évalué l'efficacité de la régulation par un plafonnement des prix comme moyen d'éliminer la sélection des risques sans nuire à la concurrence. Le plafonnement des prix a été présenté comme une solution à ces cotisations élevées, les décideurs politiques et les économistes suggérant qu'il peut corriger les défaillances du marché tout en permettant à celui-ci de fonctionner (par exemple, Chernew et al., 2019). Son modèle se concentre sur les marchés de l'assurance générale avec sélection adverse, où les entreprises proposent différents types de plans.
L'article présente un modèle avec des compagnies d'assurance et des consommateurs, dans lequel les compagnies proposent des grilles de prix ainsi que des prix plafonds. Le prix final est le minimum entre le prix de la grille tarifaire et les prix plafonds des concurrents : si le prix du plan est supérieur au prix plafond, le prix est ajusté à ce niveau.
L'analyse révèle que les prix plafonds limitent les écarts de rentabilité des entreprises et permettent de maintenir des allocations efficaces et justes pour les individus. Si les législateurs ont accès à ces informations, ils peuvent alors fixer des prix plafonds sans dépendre des entreprises, mais ce n'est généralement pas le cas et ils doivent plutôt se fier à la transparence des entreprises. L'avantage du modèle utilisé ici est que les entreprises fixent leurs prix plafonds sans dépendre d'une telle autorité centrale (c'est-à-dire de manière décentralisée), ce qui reproduit plus fidèlement les conditions du monde réel. Ce modèle démontre que la régulation par plafonnement des prix réduit la sélection des risques, ce qui permet à l'économie de parvenir à un partage efficace des risques. En outre, la réglementation proposée en matière de plafonnement des prix ne nuit pas à l'efficacité de la concurrence.
Mise en oeuvre
En ce qui concerne la mise en œuvre, le professeur Dosis fait remarquer que l'électricité, l'enseignement supérieur, les télécommunications et les soins de santé sont déjà généralement régulés par des prix plafonds. En France, par exemple, les prix de l'électricité sont actuellement plafonnés en raison de l'inflation galopante. Alors que l'assurance est étroitement réglementée, la variété des plans disponibles complique la situation. Cependant, le professeur Dosis suggère qu'une stratégie pourrait être la mise en place d'une étape intermédiaire où les compagnies proposent les plans que toutes les compagnies devraient offrir, avant de procéder à l'ajustement du plafonnement des prix tel que décrit dans le modèle.
Référence
Dosis, A. (2022). Price caps and efficiency in markets with adverse selection. Journal of Mathematical Economics, 99, 102591.