Avec Stefan Gröschl
Chaque année, l’ESSEC organise durant le mois de mars les Gender Equality Days*, des journées de réflexion sur l’égalité des genres. Cette année n'a pas fait exception à la règle. La communauté des professeurs de l'ESSEC, à travers le Séminaire du Centre d’Excellence Management et Société (CEMAS), s'est réunie pour échanger et présenter leurs recherches autour de ce thème.
Les quotas de diversité : de multiples perspectives ?
Junko Takagi, professeur titulaire de Chaire Leadership et Diversité, nous a donné un avant-goût du livre co-écrit avec son collègue, le professeur, Stefan Gröschl, Diversity Quotas, Diverse Perspectives. Le livre explore l'application des quotas et de la discrimination positive au niveau institutionnel et organisationnel, révélant ainsi la nature complexe des politiques mises en place dans différents pays. Il s’intéresse en premier lieu aux initiatives liées au genre.
Le phénomène de sous-représentation chez les cadres supérieurs
Il est indiscutable que les femmes sont sous-représentées dans la direction des entreprises, malgré de nombreuses tentatives pour remédier au problème par le biais de l'éducation et de la législation. C’est pourquoi les quotas destinés aux conseils d'administration ont été utilisés comme un moyen juridique pour limiter les écarts homme-femme dans plusieurs pays, notamment en Norvège, aux Pays-Bas, en Espagne et en France. Les quotas ne sont pas réservés aux femmes ; ils s'appliquent également aux hommes. Il s’agit donc bien d’une question de genre dans son ensemble.
La Norvège, une société égalitaire ?
En 2002, la Norvège a été le premier pays à lancer une politique de quotas de genre destinée aux conseils d'administration. Cela semble aller de soi, puisque les pays scandinaves se targuent d'être parmi les sociétés les plus égalitaires. Pourtant, aussi surprenant que cela puisse paraître, l'initiative des législateurs était basée sur des statistiques inquiétantes : entre 1992 et 2002, le pourcentage de femmes dans les conseils d'administration stagnait autour de 7%.
Donner l’exemple
De nombreux pays ont suivi l'initiative de la Norvège. La Hollande a fixé un quota de 30% et l'Espagne de 40% de femmes pour les conseils d'administration. L’essentiel n’est pas le quota lui-même, mais les conséquences pour les entreprises refusant de le respecter. Dans les deux pays, les entreprises contrevenantes devaient justifier leur non-conformité et proposer en réponse une stratégie. Le cadre juridique étant moins contraignant que celui de la Norvège, et n’étaient guère satisfaisants. Aux Pays-Bas, seules 14% des entreprises ont atteint le quota, et 75% d’entre elles ne comptaient toujours aucune femme dans leur conseil d’administration. La même chose s'est produite en Espagne en 2014 : seulement 16,6% des entreprises avaient atteint l’objectif des 40%. Ces exemples montrent l'importance des sanctions dans la mise en œuvre, et le succès, des quotas liés au genre.
Au-delà des chiffres
Il est essentiel de se poser la question de la signification de ces chiffres et de leur interprétation. Les études menées sur la contribution des femmes aux conseils d'administration ont donné des résultats contradictoires. Certaines concluent que les femmes ont apporté des contributions positives, tandis que d'autres études concluent sur des apports plus négatifs ou nuls. Il est vrai cependant que les entreprises qui travaillent sur les questions de genre semblent être plus résilientes sur le long terme.
La Norvège a montré la voie à d'autres pays européens, et il est certain que la législation sur les quotas a contribué au changement de culture sur le lieu de travail, malgré le cadre juridique contraignant. Par conséquent, de nombreux pays, tels que les Pays-Bas, l'Espagne, mais aussi la France, mettent actuellement en œuvre une législation sur les quotas qui réduira, voire éliminera, le fossé entre les sexes.
Pour visionner les conférences des Gender Equality Days, suivez ce lien.