Issu du livre "The Road to Luxury: the Evolution, Markets and Strategies of Luxury Brand Management" par Ashok Som et Christian Blanckaert, 2015
Bien que beaucoup aient cru que l'industrie du luxe serait à l'abri de la crise, la récession de 2008-2009 a finalement changé le comportement des consommateurs de luxe. Tout d'abord, ces consommateurs sont devenus plus exigeants: alors qu’avant la crise, ils auraient acheté dix produits, ils n’en prennent maintenant plus qu’un ou deux, et ce après mure réflexion. Ensuite, ils ont fait preuve d’un regain d'intérêt pour la consommation discrète: de plus en plus de consommateurs veulent éviter les produits trop « flashy ».
Avec les changements dans le comportement de la consommation, les marques de luxe ont dû se repositionner au cours de cette période de transition. Étonnamment, la plupart des grandes marques ont choisi des stratégies clairement opposées, révélant ainsi que l'industrie du luxe était hétérogène et en constante évolution.
1. La rationalisation des coûts
Certaines marques de luxe ont eu le même réflexe: réduire les dépenses, régner sur les facteurs de croissance. Des stratégies incluant le gel de l'embauche, la réduction du nombre et de la taille des collections, la rationalisation des dépenses médias, et la réduction des effectifs sont ainsi apparues. Dolce & Gabana a cassé les prix. Stella McCartney a fermé sa boutique à Moscou seulement 18 mois après son ouverture. Burberry a mis fin à sa collection Thomas Burberry. Prada a déplacé sa production en Chine pour certains produits.
2. La mondialisation
Les autres marques, cependant, ont vu la crise comme une opportunité de s’étendre géographiquement et de toucher de nouvelles clientèles. Prada, par exemple, a mis en place le plan d’investissement le plus agressif qu’il ait jamais entrepris en 2008-2009 dans un effort pour étendre son réseau de distribution. De même, Hermès a ouvert des magasins à Manchester, Las Vegas et Wuxi en Chine - et a bien résisté à la crise.
3. La diversification
Certaines expansions ont été entreprises horizontalement dans différentes catégories traditionnelles du luxe. Par exemple, Louis Vuitton s’est renforcé dans la haute couture, la haute joaillerie et les montres. Coach s’est orienté vers des prix inférieurs pour le consommateur, en leur fournissant une plus grande gamme de produits accessibles. D’autres marques de luxe ont exploré de nouvelles façons d'atteindre le client grâce à la publicité mobile, ou les ventes en ligne, par exemple.
4. La capacité à « tenir bon »
Mais ce qui est le plus frappant dans l'industrie du luxe est la capacité de certaines marques à résister à la crise en ne changeant rien, en restant fidèles à leur héritage de luxe. Bottega Vanetta, par exemple, a continué à fabriquer ses produits en Italie et a investi dans ses artisans pour être certains que la production garde sa qualité traditionnelle. Ce sang-froid a permis à la marque d’avoir deux longueurs d'avance sur ses concurrents paniqués.
5. Upscaling
Certains des plus grands succès post-crise viennent de ces marques qui ont choisi de renforcer leur statut de luxe. Christian Dior, par exemple, abandonna son logo et son marché d’accessoires pour se focaliser sur l’upscaling, dans l'espoir que la crème des « super-riches » ne soit pas affectée par la crise. François-Henri Pinault, PDG de Kering, était de l’avis suivant : "Il y a une nouvelle perception du luxe, un luxe sophistiqué plus discret où les notions de patrimoine et d'artisanat jouent un rôle majeur."
Qu'est-ce que la diversité des réactions signifie au sujet de l'industrie du luxe dans son ensemble? La croissance dépend de la capacité de chaque marque à comprendre l’étendue des clients potentiels, à fixer une stratégie reposant sur un langage spécifique. Il n'y a pas de réponse universelle, ni de langage universel. Chanel parle Chanel, Hermès parle Hermès - chaque marque fait face à un défi particulier pour continuer de faire rêver ses clients.
Issu du livre "The Road to Luxury: the Evolution, Markets and Strategies of Luxury Brand Management" par Ashok Som et Christian Blanckaert, 2015