Une “marque patrimoniale” ou une “marque avec patrimoine”?

Une “marque patrimoniale” ou une “marque avec patrimoine”?

 

La marque. Le mythe. La légende. L’héritage d’une marque joue un rôle important dans sa gestion, il est vu comme le moteur de la valeur de la marque et de la confiance des consommateurs. C’est un aspect inestimable de son pedigree, étant donné son caractère unique et le fait qu’il est difficile pour les concurrents de le copier. 

Mais le simple fait d’exister depuis des décennies ne fait pas une marque patrimoniale. Être une marque patrimoniale signifie que celle-ci crée un récit sur son histoire et l’utilise dans son marketing. C’est le cas de nombreuses marques de luxe : pensez à Chanel, Louis Vuitton et Hermès, qui utilisent leur histoire pour communiquer et commercialiser leurs produits. Louis Vuitton a commencé avec ses malles à fond plat, et continue de tisser « l’esprit du voyage » dans son identité de marque. La marque de champagne de luxe Dom Pérignon tire son nom d’un moine du XVIIe siècle qui, selon la légende, aurait accidentellement découvert le champagne. En fait, le vrai Dom Pérignon a effectivement découvert plusieurs innovations de vinification, mais pas la méthode champenoise : la marque a cultivé le mythe autour de l’invention du champagne dans son marketing, plutôt que les véritables événements historiques.

Par opposition, nous avons L’Oréal, une marque fondée avant Chanel, mais non positionnée comme une marque patrimoniale. Au contraire, L’Oréal se positionne comme un leader de l’innovation dans le domaine de la beauté - en s’appuyant sur l’excellence de la recherche, l’évolution constante et la technologie de pointe, et en les utilisant comme des leviers plutôt que comme une histoire dans la gestion de sa marque. Il y a aussi le cas de Hugo Boss. Fondée en 1924, la marque a connu une forte croissance de ses ventes pendant la Seconde Guerre mondiale... parce qu’elle fournissait des uniformes au gouvernement nazi. Naturellement, Hugo Boss préfère laisser cette partie de son histoire en dehors de son marketing. Ces deux marques sont donc considérées comme des « marques avec héritage », plutôt que comme des « marques patrimoniales », malgré leur longévité. Ces exemples soulignent que la longévité, bien qu’importante, ne qualifie pas immédiatement une marque de patrimoniale. 

Le manque de longévité ne met pas non plus immédiatement hors course les marques plus récentes. Si la longévité est une preuve positive de la confiance durable des consommateurs et de la crédibilité de la marque, les nouvelles marques qui s’appuient sur un héritage peuvent toujours être considérées comme des marques patrimoniales. Prenons le cas de Shang Xia, une marque chinoise fondée par Hermès en 2008 : elle fait appel à l’artisanat traditionnel chinois, en s’appuyant sur le patrimoine culturel plutôt que sur l’héritage de la marque elle-même. Cela signifie qu’être une marque patrimoniale est à la fois une question de patrimoine culturel et de patrimoine d’entreprise, et que les responsables marketing peuvent cultiver une marque patrimoniale en tissant des éléments issus de ces deux caractères. L’histoire de la marque n’est pas le seul élément important : le récit qui peut être créé à partir du patrimoine culturel et du patrimoine de l’entreprise est ce qui cimente une marque en tant que « marque patrimoniale » ou « marque avec patrimoine ».

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