L’entreprenariat social génère un intérêt croissant dans l’ensemble du monde, et tout particulièrement du côté des chercheurs. Le problème des recherches actuelles est qu’elles sont issues de cas d’études et de réussites individuels : elles n’arrivent donc pas à obtenir de vue d’ensemble. Mais alors, quelles sont nos connaissances à propos de cette variété de l’entrepreneuriat social, à la fois individuel et institutionnel ?
Pour répondre à ce manque dans la recherche, notre article analyse une méthodologie qui pour la première fois choisit une approche globale de la situation de l’entrepreneuriat social, permettant ainsi des comparatifs inter-pays. Nous avons mis en place un questionnaire qui est au cœur du plus grand effort actuel pour rassembler des données sur l’entrepreneuriat social, le «Global Entrepreneurship Monitor ».
Le questionnement à l’origine de cet article fut simple : « comment pouvons-nous développer une méthodologie qui nous permette de mesurer l’entrepreneuriat social à travers le monde tout en étant cohérent avec ce qui définit aujourd’hui l’entrepreneuriat ? »
Bien que nous n’ayons pas encore entièrement fini de répondre à cette question, nos travaux ouvrent la voie vers de nouvelles recherches tout en suggérant eux-mêmes des tendances fascinantes.
Les entrepreneurs sociaux : une espèce rare
Dans un premier temps nos travaux semblent confirmer la rareté de l’entrepreneur social. Pourtant la rareté est ici synonyme d’influence. Des individus comme Mohammad Yunus de la Grameen Bank (Bangladesh) ou Ibrahim Abouleish de Sekem (Egypte) sont parvenus à mettre en place des solutions nouvelles pour éradiquer des problèmes sociaux dans leur pays. Et étant donné la rareté des entrepreneurs sociaux et leur importance sociale, il est nécessaire de mieux comprendre ce qui les motive, où ils travaillent et comment ils interagissent avec ce qui les entoure.
Un plus grand développement économique signifie plus d’entrepreneurs sociaux
On pourrait être amené à penser qu’un moindre niveau de développement économique créerait plus d’opportunités pour les entrepreneurs sociaux et conduirait ainsi à un plus grand niveau d’entrepreneuriat social. Et pourtant il n’en est rien : les individus qui se sentent en sécurité économiquement parlant sont plus à même d'avoir des valeurs post-matérialistes et attachent plus d’importance à l’émotion, à l’indentification personnelle et à la qualité de la vie, qui sont de fortes motivations pour l’entrepreneuriat social.
Différents types de capitalismes, différents niveaux d’entrepreneuriat social
Même si des recherches plus poussées seraient nécessaires pour comprendre comment les variables du contexte institutionnel rendent compte de la prévalence de l’entrepreneuriat social, nous avons trouvé que plus l’économie est libérale, plus elle est propice à l’émergence de businesses sociaux. Cela semble expliquer pourquoi les régions dominées par une « économie coopérative » (la plupart des pays européens) tendent à avoir moins d’entrepreneurs sociaux que leurs homologues libéraux et américains.
Dans l’ensemble, nos travaux sont la première tentative pour permettre aux chercheurs de mieux comprendre et de mieux rendre compte du phénomène d’entrepreneuriat social. En fournissant une base de données de près de 600 entrepreneurs sociaux, débutants ou bien établis, nous pensons que cette méthode donne toutes les clefs pour réaliser ce but.