L’introduction en bourse de Facebook et de Twitter a suscité à la fois excitation et appréhension. En effet, les deux évènements sont comparables au sens où ce sont deux entreprises de haute technologie qui ont généré beaucoup de battage médiatique. Néanmoins, les similitudes s'arrêtent là, selon le professeur Sridhar Arcot.
D’après les différences entre les deux introductions en bourse, est-ce que vous diriez que Twitter a tiré les leçons des erreurs de Facebook ?
Twitter a tout fait pour éviter les erreurs commises par Facebook. Avant tout, l’entreprise a limité le nombre d'actions émises : Facebook, qui en a émis beaucoup à la fois et a permis aux promoteurs de les revendre pendant l’introduction en bourse, a réduit la confiance de ses investisseurs. Twitter a au contraire choisi d’émettre de nouvelles actions au cours de l’introduction en bourse pour satisfaire une demande accrue. Et avec moins d'actions échangés, la négociation sur la Bourse de New York (NYSE) n'a pas rencontré les mêmes problèmes techniques que l'introduction en bourse de Facebook sur le NADAQ.
Plus important encore, Twitter a essayé de minimiser le battage médiatique. En effet, la loi américaine sur l'emploi stipule que les entreprises peuvent déposer une demande pour rendre publique leur entreprise auprès du SEC (Securities and Exchange Commission) tout en gardant ces informations confidentielles aussi longtemps que l’entreprise le souhaite. En gardant l'information secrète jusqu'à peu de temps avant son introduction en bourse, Twitter a évité le genre de spéculation qui a sévi lors de l’introduction en bourse de Facebook. De même, elle a restreint ses attentes afin d’éviter l'effondrement des prix que Facebook a connu.
Enfin, Twitter a retenu Goldman Sachs comme chef de file pour leur introduction en bourse plutôt que Morgan Stanley, qui gère traditionnellement les introductions en bourse technologiques, ce qui est une indication supplémentaire l’image négative de l’introduction en bourse de Facebook.
Y a-t-il des signes avant-coureurs d’une bulle financière ?
Cela dit, il est vrai que la sous-évaluation peut conduire à une bulle financière. En effet, les actions de Twitter ont été introduits à un prix relativement bas - 26 dollars - puis elles ont été ouvertes à 44 dollars. Cela signifie qu'il y avait une assez importante sous-évaluation des actions et c'est une perte d'opportunité pour l'entreprise car elle aurait pu introduire leurs actions à 44 dollars.
Cette sous-évaluation se produit parce que le battage médiatique rend très difficile une estimation de valeurs ; même si Twitter a essayé de le contrôler, le battage est toujours un problème. Les investisseurs sont attirés par Twitter car il s’agit d’une marque bien connue qui génère beaucoup de buzz. Cependant, on ne sait pas réellement comment Twitter va générer des profits. Il se peut que Twitter connaisse des difficultés, étant donné que cette entreprise est bien plus petite que Facebook et n’a jamais passé de test dans ce domaine.
Les résaux sociaux suscitent à l'heure actuelle beaucoup d'intérêt chez les investisseurs. Cependant, je pense qu'il est trop tôt pour dire qu’une bulle se forme car cela dépend de nombreux autres facteurs tels que le nombre d'entreprises cotées. Pour le moment, aucune autre entreprise similaire n’a annoncé son intention d’entrer en bourse à la suite de l’introduction en bourse de Twitter.
Quelles seraient les conséquences d’une bulle financière sur les réseaux sociaux ?
Si une bulle a lieu, la première conséquence qui vient à l'esprit est que les investisseurs pourraient perdre de l'argent. Je pense que les conséquences les plus graves concerneraient l'innovation. À bien des égards, les sociétés d’Internet sont à la pointe de l'innovation. Ce sont elles qui apportent de nouvelles idées qui améliorent l'ensemble de notre économie et changent la façon dont nous travaillons. Une bulle, où les valorisations sont élevées, permet aux entreprises avec des idées moyennes de lever des capitaux., Le crash dû à une bulle serait un énorme revers pour le processus d'innovation car les investisseurs seraient alors réticents à financer même de bonnes idées.