IFRS : les Américains s’y plieront, mais en traînant les pieds

IFRS : les Américains s’y plieront, mais en traînant les pieds

La communauté internationale du reporting financier des entreprises multinationales commence peu à peu à utiliser une seule base en comptabilité, les normes internationales d’information financière (IFRS). La grande question pour la communauté internationale est de savoir si les États-Unis vont suivre le mouvement : vont-ils abandonner leurs chers GAAP (Generally Accepted Accounting Principles) au profit des normes internationales d’information financière ? La réponse pour le moment semble être négative, ou alors laisser très peu de possibilités.

La SEC (Securities and Exchange Commission), qui s’occupe de préciser le régime de rapport pour les entreprises qui émettent des titres sur le marché des capitaux américain, a longtemps soutenu les IFRS, mais au fil du passage des présidents de la SEC et des différents chefs comptables, l’enthousiasme de départ a décliné puis disparu.

Les présidents de la SEC vont et viennent selon les changements de président. Mary Schapiro, nommée par le Président Obama, a reporté une décision que l’administration précédente avait jugée urgente. Elle a demandé au personnel de faire un rapport sur les avantages et les inconvénients du passage aux IFRS ; ce rapport, attendu au départ pour fin 2011, a finalement été publié en juillet 2012, mais il ne comportait pas de recommandations.

Pour savoir à quoi s’attendre, il vaut mieux écouter ce que James Kroeker, chef comptable de la SEC depuis juillet 2012, a dit à des membres influents de la communauté internationale du reporting financier : la décision finale doit être prise par le SEC, et qu’il serait probable –si tant est que l’on puisse parler de probabilité- que :

1)      Les États-Unis garderaient leur label « GAAP ».

2)      L’institution normative pour le secteur privé américain, le Comité des normes comptables et financières (FASB) serait chargée d’évaluer les normes individuelles et pourra les modifier pour les faire correspondre aux usages américains.

3)      La période de transition durerait de cinq à sept ans. 

M. Kroeker a rajouté que le programme de « convergence » actuel, dans lequel les États-Unis et les instances normatives internationales travaillent sur des projets communs, tels que le crédit-bail et sur la reconnaissance du revenu, devait prendre fin. Selon lui, dans un futur proche les instances normatives internationales créeraient une sorte de forum où les autorités publiques en charge de l’application nationale et régionale se réuniraient régulièrement. Le Bureau international des normes comptables (IASB) devrait impliquer ce forum dans la mise au point des normes afin de réduire le risque de « gravures » de la part des normes internationales d’information financière.

M. Kroeker a fait une allocution à Londres lors d’un colloque de l’IFRS advisory council, une institution qui rassemble de nombreux intérêts du monde du reporting financier, afin de discuter du travail fait par le Bureau international des normes comptables. Il s’est excusé pour le retard pris par le bilan du SEC, en expliquant que le passage de la loi américaine Dodd-Frank avait occupé longtemps le personnel, tandis que le Bureau international des normes comptables et le Comité des normes comptables et financières n’avaient pas achevé non plus le projet de convergence, dont l’aboutissement était prévu au départ pour le milieu de l’année 2011.

Il semble que le point de vue dominant dans la communauté internationale du reporting financier soit que le SEC ne prendra aucune décision avant que le nouveau président des États-Unis n’entre en fonction l’année prochaine. Il est clair que les normes internationales d’information financière ne seront pas entièrement approuvées, et l’on peut s’attendre à une lente réduction des différences, les États-Unis occupant un rôle nettement moins important dans la mise en place des normes internationales d’information financière.

Si la SEC a mis en place un programme officiel de ratification, la question reste ouverte de savoir quel type de seuil le Comité des normes comptables et financières appliquerait pour ratifier les normes internationales d’information financière. La SEC avait auparavant suggéré que les normes internationales d’information financière consistent en une amélioration des GAAP américains, sans quoi ces normes ne seraient pas ratifiées. En revanche, cela pose la question de savoir si le Comité des normes comptables et financières ratifierait une norme internationale d’information financière qui aurait autant de valeur qu’une bonne norme américaine mais qui serait une alternative dans un groupe également valide. Est-ce que le Comité des normes comptables et financières ratifierait cela ?

Évidemment, l’Union Européenne comporte un mécanisme de ratification similaire, mais la commission européenne ne peut que supprimer des éléments d’une norme internationale d’information financière, sans pourvoir en rajouter ; par conséquent, elle ne n’a pu faire jusqu’à présent que des gravures. Si les États-Unis peuvent s’accommoder de cet arrangement, il se peut que des Européens se demandent s’ils ne devraient pas aussi appeler les normes internationales d’information financière des GAAP européens et les adapter librement.

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